Quatre gardiens de la maison d’arrêt se sont donc fait photographier en uniforme, adressant à l’objectif du greffe le « salut de la quenelle ». Que voulaient-ils signifier par cette dérisoire manifestation ? Ce geste de Dieudonné, qui semble aujourd’hui recueillir la faveur auprès des amateurs de facéties sulfureuses, est pourtant loin d’être anodin. Il mime un salut nazi inversé – de même y avait-il, au temps des messes noires, un signe de croix inversé – afin, dans l’idiome obscène de Dieudonné, de « glisser une quenelle », comprenons de sodomiser un système dominé par ceux que le nazisme n’a pas pu exterminer. Geste donc surfant sur les interdits et l’obscénité, et qu’on renverrait volontiers d’un sourire apitoyé au stade pipi-caca des gosses s’il ne faisait en même temps signe vers ce qui est, dans l’histoire contemporaine le tragique par excellence : l’homophobie, l’antisémitisme. Cet incident, dans un climat où les repères progressivement disparaissent, mérite d’être considéré avec gravité. Et d’abord (d’autant plus qu’il s’agit de fonctionnaires du ministère de la justice ayant agi dans l’exercice de leur fonction) il faut maintenant que la hiérarchie sanctionne, mais également que la justice se prononce.
Alain David